Paroles de lauréats : Fabrice Domange
16 / 13.05.2020

Paroles de lauréats : Fabrice Domange

Face à la crise, chaque jour, les lauréats et alumni Choiseul, mais aussi plusieurs de nos amis et partenaires, réagissent. Une série d’échanges avec plusieurs d’entre eux qui nous font part de leur vécu, nous exposent leurs stratégies de rebond mais aussi nous livrent leur vision du « jour d’après ».

Aujourd’hui avec Fabrice Domange, Président de Marsh France, filiale française du leader mondial du conseil en risque et du courtage d’assurance. Fabrice Domange est Alumni Choiseul 100.

La transformation économique, sociétale et digitale, sera profonde et aura des impacts considérables sur nos business models ; les problématiques de risque, de stratégie et de ressources humaines s’entrecroiseront encore davantage dans un environnement économique rendu plus complexe.

En tant qu’expert de la gestion des risques, aviez-vous anticipé une crise de cette ampleur ? 

Chaque année depuis 15 ans, en partenariat avec notre maison-mère Marsh & McLennan, le Forum Economique Mondial publie un rapport sur les risques mondiaux, basé sur une enquête réalisée auprès de 1000 experts et dirigeants d’entreprise dans le monde.

Ce rapport livre une analyse approfondie des principaux risques mondiaux et de leurs interactions. Or, il mentionne depuis déjà plus d’une décennie le risque pandémique comme l’un des principaux risques mondiaux, tant en termes de probabilité que de gravité.

Bill Gates ne s’y est pas trompé non plus, qui alerte publiquement depuis 2015 sur ce danger « où les gens infectés se sentent en bonne santé et prennent l’avion ou vont au supermarché », alors qu’un virus hautement contagieux serait en circulation.

Dans la mesure où le risque était identifié, et alors même que nous avons été successivement confrontés au SRAS en 2003, H5N1 en 2005, H1N1 en 2009, Ebola en 2014… Nous pouvons aujourd’hui être légitimement surpris du manque d’anticipation et de préparation qui se fait jour dans de nombreux pays.

Aujourd’hui, compte tenu de l’ampleur de la crise, force est de constater que malgré la connaissance du risque pandémique, malgré les appels des experts à la sensibilisation et à la préparation ces dernières années, nous subissons de plein fouet le manque d’investissement dans le secteur médical et hospitalier et dans la protection des populations.


Le secteur de l’assurance est en première ligne dans cette crise mondiale. Comment Marsh France, filiale du courtier américain, fait-elle face aux événements et se mobilise t’elle auprès de ses clients ?

Tous les regards se tournent en effet vers les assureurs, eux-mêmes impactés par le COVID-19, et dont il serait évidemment illusoire, voire dangereux, de supposer qu’ils puissent indemniser tous les sinistres liés à la crise actuelle. Rappelons que l’assurance repose sur le principe de la mutualisation des risques, identifiés préalablement au paiement de toute prime, et implique de fait la répartition du risque dans l’espace et dans le temps.

Les assureurs ont leurs contraintes de rentabilité technique. Il s’agit d’une profession réglementée, dont les fonds propres sont obligatoires et imposés par les régulateurs. Leurs actifs sont, eux aussi, impactés par la baisse des marchés financiers et à l’inverse des institutions financières, les assureurs n’ont pas bénéficié d’aides d’état. Ils font cependant preuve de bienveillance et de compréhension à l’égard des assurés et ont été nombreux à prendre des mesures exceptionnelles pour protéger les personnes et les entreprises les plus impactées par le coronavirus.  

Pour revenir à Marsh, en notre qualité de courtier, notre rôle est d’aider nos clients, de les conseiller et de les accompagner en profondeur et en détail sur les processus de gestion et de réduction de leurs risques, ainsi que sur leurs programmes d’assurance : analyse et identification de la cartographie des risques, revue des garanties, montages, solutions alternatives, approche sectorielle…

Dès le premier jour du confinement, nous avons assuré une continuité d’activité totale et contacté tous nos clients pour prendre de leurs nouvelles et répondre à leurs nombreuses questions sur les garanties des contrats d’assurance et les couvertures du risque épidémique. Nous les avons informés et conseillés quant aux mesures à prendre, tant pour mettre en place des plans de continuité d’activité que pour protéger leur personnel, réduire les risques cyber liés au télétravail massif ou ceux relatifs à l’inoccupation des locaux, protéger leur trésorerie grâce à l’assurance-crédit…

Bien entendu, nous les accompagnons aussi dans la déclaration de leurs sinistres, notamment en pertes d’exploitation, mais également en RC ou en cyber. Des solutions existent ; la valeur ajoutée du courtier réside dans sa capacité à construire des solutions et des montages sur-mesure en fonction des besoins de ses clients. Le risque cyber qui menace une banque, par exemple, n’est pas le même que celui auquel une compagnie aérienne est confrontée, qui est lui aussi différent de celui d’une société industrielle… Notre rôle, entre autres, est d’adapter les « wordings », les textes des polices d’assurance, afin qu’ils répondent à  chaque situation particulière.

Ainsi, même dans la situation de crise que nous vivons actuellement, les wordings spécifiques des polices que nous avons placées auprès de nos partenaires assureurs peuvent nous permettre d’obtenir des conditions d’indemnisation très favorables pour nos clients.

Enfin, nous nous sommes également attelés très rapidement à la conception et au déploiement de nouvelles solutions pour répondre aux besoins que la crise a vu émerger : par exemple, le développement d’une solution combinant assurance et assistance en cas de contraction du Covid-19 par le personnel des entreprises dont l’activité, essentielle au pays, a dû continuer pendant la période de confinement. Ou encore la mise en place instantanée d’une couverture contre les risques cyber avec un paiement de prime différé dans le temps, pour permettre aux entreprises, sans impacter immédiatement leur trésorerie, d’être protégées au moment où le risque est le plus élevé. Ah, ce risque cyber, qui pourrait bien être le prochain virus !


Cette crise oblige chacun à s’interroger, voire à se réinventer. À quoi ressemblera le “monde d’après” et comment la gestion de risques s’y inscrira-t-elle ? 

Chacun espère que le monde d’après, ou le « new normal », comme l’expression circule déjà, sera empreint d’une prise de conscience, de plus de responsabilité, de partage, de solidarité, de respect de l’environnement… Nous souhaitons tous que, d’une certaine façon, cette crise économico-sanitaire soit aussi l’opportunité de faire avancer l’humanité.

Il convient cependant de ne pas faire preuve de naïveté et de rester vigilants, car le risque est grand malheureusement d’assister au contraire à une montée du repli sur soi et du protectionnisme en général. Surtout, ne pas se laisser gagner par le pessimisme et rester alertes et mobilisés ! Car après tout, le monde de demain sera ce que nous en ferons. L’impulsion viendra de chacune et de chacun, pour nourrir notre réflexion collective et progresser ensemble.

La transformation économique, sociétale et digitale, sera profonde et aura des impacts considérables sur nos business models ; les problématiques de risque, de stratégie et de ressources humaines s’entrecroiseront encore davantage dans un environnement économique rendu plus complexe.

Dans cette perspective, le groupe Marsh & McLennan tient un rôle de premier plan et dispose d’un positionnement unique pour préparer l’après crise, grâce à la complémentarité de ses quatre filiales, leaders dans leurs domaines, qui travaillent conjointement pour proposer des solutions d’ensemble :

  • Oliver Wyman, conseil en stratégie et en transformation des entreprises ; crucial post crise pour la plupart de nos clients
  • Mercer, conseil en ressources humaines, santé, prévoyance, gestion des talents, retraite et investissements ;
  • Guy Carpenter, Conseil et placement en réassurance, pour accompagner également la résilience de nos partenaires assureurs ;
  • et Marsh, conseil en risque et courtage d’assurance.

Je souhaite à ce propos souligner que l’assurance, encore trop souvent perçue comme un coût, est en réalité un outil stratégique tant de protection du bilan et du compte de résultat de l’entreprise, que de la protection, la gestion et la rétention de ses talents.

Le risque doit s’appréhender sous l’angle de son coût total, et notre raison d’être consiste à aider nos clients à optimiser ce coût en construisant leur résilience et en protégeant leurs actifs et leurs forces vives.


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