Paroles de lauréats : Pauline Duval
2 / 23.04.2020

Paroles de lauréats : Pauline Duval

Face à la crise, chaque jour, les lauréats et alumni Choiseul, mais aussi plusieurs de nos amis et partenaires,  réagissent. Une série d’échanges avec plusieurs d’entre eux  qui nous font part de leur vécu, nous exposent leurs stratégies de rebond mais aussi nous livrent leur vision du « jour d’après ».

Aujourd’hui avec Pauline Duval, directrice-générale du groupe familial créé il y a 25 ans. Avec 4.000 collaborateurs, le groupe Duval est un acteur indépendant majeur du secteur de l’immobilier, résolument engagé dans la ville de demain et tourné vers l’international. Pauline Duval est lauréate du Choiseul 100 et du Choiseul Ville de demain.

J’espère que cette crise entraînera des changements de mentalité en France. Je pense en particulier à deux tendances : la relocalisation et la responsabilisation de notre économie.

Comment le Groupe Duval, dans la diversité de ses activités, s’est-il adapté à cette crise sans précédent ?

Nous sommes tous confrontés à une situation sans précédent. En effet, cette crise sanitaire et économique mondiale nous impacte tous, petites ou grande entreprise, d’abord par la rapidité et par l’ampleur de sa propagation. Ensuite par l’ampleur de l’incertitude qui prévaut à court et moyen terme.

En ce qui nous concerne, nous sommes un Groupe familial diversifié ayant intégré l’ensemble de la chaîne de valeur de l’immobilier. Nous sommes à la fois propriétaires, locataires, gérants et commerçants et subissons donc les effets de cette crise à différents niveaux et de manière désintermédiée.

Certaines de nos activités immobilières sont naturellement à l’arrêt du fait de la suspension des chantiers à laquelle s’ajoute l’incertitude autour du report du second tour des élections municipales. D’autres métiers doivent s’adapter à la fermeture temporaire des enseignes ou à la fragilité de certains de nos prestataires.

Certes, la diversité de nos activités nous apporte de la résilience, mais elle nous révèle aussi à quel point notre écosystème immobilier est interdépendant. D’où l’importance d’une solidarité unanime pour surmonter cette crise et organiser – de manière soutenable – notre relance économique.

C’est pourquoi, en ce qui concerne notre foncière, je considère que nous devons avancer main dans la main avec nos locataires, en privilégiant la transparence, pour nous donner tous les moyens d’amorcer la reprise ensemble. Notre Groupe a accordé une franchise de loyers pour minimum un mois à tous les commerces fermés. Nous avons également prévu un accompagnement sur mesure de ces sociétés pour qu’il n’y ait pas de maillon faible et pour pouvoir ainsi, à notre niveau, soutenir l’économie française.

Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres qui me permet d’illustrer ce besoin de responsabilisation de tous les acteurs économiques, à tous les niveaux.

Face à la brutalité de cette situation, nos équipes ont été exemplaires par leur réactivité et leur détermination. Nous avons immédiatement mis en place une cellule de crise et restons en veille permanente des nouvelles mesures qui seront annoncées par le Gouvernement. L’agilité est cruciale et nous feront le nécessaire pour nous adapter en temps réel à l’évolution de la situation.

Pendant cette période, nous avons alerté l’ensemble de nos directeurs afin de rester vigilants sur leur position de cash. En tant que Directrice Générale, j’ai demandé à ce que nos filiales maintiennent une saine gestion de leur trésorerie, tout en accordant une attention particulière aux plus petits fournisseurs en situation de difficulté financière.  

Dès le début de cette crise il nous a semblé fondamental de maintenir et renforcer le dialogue nos partenaires, nos clients et surtout nos collaborateurs. Ils reconnaissent notre culture entrepreneuriale et nos valeurs humaines. C’est ce qui les motive d’être à nos côtés. C’est une grande fierté pour moi d’en avoir encore la preuve aujourd’hui.


Le Groupe Duval est aussi très présent en Afrique à travers notamment des golfs, des résidences d’affaires et des hôtels. Quel diagnostic faites-vous de la situation qui prévaut là-bas ?

Notre Groupe a une forte ambition de développement à l’international et en particulier en Afrique : c’est un de nos trois axes stratégiques, aux côtés de la diversification de nos activités et de l’innovation.

Nous y sommes présents dans une dizaine de pays, majoritairement francophones et intervenons sur une grande diversité de métiers : immobilier, tourisme, mais aussi forages d’eau, fondations spéciales, microfinance et assurance. Notre stratégie est fondée sur des partenariats agiles en étroite coordination avec des acteurs locaux.

Sans surprise, certaines de nos activités que vous évoquez, et en particulier notre pôle exploitation, sont frontalement impactées par la crise.

Comme c’est le cas de toutes les entreprises de ces deux secteurs, nos filiales spécialisées dans le tourisme – où nous sommes numéro 2 européen avec notre marque Odalys, mais aussi nos activités dans les golfs – où nous sommes leader européen avec la marque Ugolf, sont aujourd’hui à l’arrêt. Et ce pour une période indéfinie, qui s’adaptera bien évidemment en fonction l’évolution de la situation sanitaire et règlementaire.

Mais il ne faut pas oublier que cette situation est temporaire et que la raison d’être de notre entreprise repose sur une vision responsable et à long terme. Nous avons depuis toujours privilégié une stratégie prudente et une vision pérenne qui ne soient pas fondamentalement remises en cause par des chocs conjoncturels.

Une stratégie prudente, pérenne mais aussi ambitieuse. Cela nous permet de réaffirmer aujourd’hui nos projets de développement en Afrique, ainsi que nos engagements entrepreneuriaux et humanitaires que nous comptons poursuivre avec la même passion que nous avons pour ce continent.  

La crise affecte tous les pays avec la même ampleur et violence. Et contrairement au scénario catastrophe que certains annonçaient, beaucoup de pays africains – dont notamment la Côte d’Ivoire, le Sénégal, la République démocratique du Congo, le Burkina Faso, le Togo, le Bénin, mais aussi bien d’autres – ont géré la situation de manière exemplaire, avec pragmatisme, justesse et anticipation. Ils ont su adopter des mesures rapides de prévention, dépistage, isolement et règles d’hygiène. Il faut leur reconnaître ce mérite de l’agilité qui est remarquable et qui ne fait que confirmer la vision de long terme que nous avons pour ce continent.   


D’un point de vue économique, comment envisagez-vous l’après crise ? Quelle est votre stratégie de relance ?

En tant que Groupe familial, nous pensons que toute création de valeur durable repose sur un partage de valeurs. Les valeurs humaines et entrepreneuriales sont dans notre ADN et cette crise ne fait que révéler leur importance. Je suis convaincue que cette culture entrepreneuriale que nous avons est un atout majeur pour notre Groupe. Pourquoi? Parce qu’un entrepreneur est engagé et optimiste.

La priorité du Groupe en ce moment est en effet de concrétiser cet optimisme et de préparer l’avenir. Nous travaillons avec nos équipes sur un plan de relance tout en misant sur nos points forts.

Sur l’immobilier, nous continuerons notre stratégie de valorisation des territoires, de renforcement des engagements environnementaux et d’innovation. Pour y parvenir, nous poursuivrons la digitalisation de nos activités et la collaboration avec des jeunes sociétés innovantes comme SmartHab, acteur du logement connecté et de la consommation responsable.

Pour Odalys nous travaillons sur différentes initiatives. La valorisation de la destination France a toujours été notre mission car nous sommes un Groupe fortement ancré dans les territoires : nous souhaitons la renforcer. Nous visons aussi l’assouplissement de nos conditions de vente pour rassurer nos clients et leur permettre de réserver « sans risque ». Enfin, nous insistons sur l’exigence dans l’application des protocoles sanitaires. L’exigence est bien intégrée chez nous, car elle fait partie de nos valeurs d’entreprise, avec l’agilité et la créativité.

Concernant Ugolf, nous souhaitons bien évidemment une réouverture rapide avec toutes les mesures de protection des salariés et des clients. Par ailleurs le golf présente tous les atouts d’une pratique sportive saine et sans risque car il permet une bonne distance entre les joueurs. Mais aussi le contact avec la nature… si nécessaire après une longue période de confinement ! Notre ambition pour Ugolf est pérenne : conforter notre position de leader européen et figurer parmi les leaders mondiaux.

De manière transverse, nous continuerons à concentrer nos efforts sur la réalisation de synergies stratégiques entre les différents métiers du Groupe. C’est ce qui fait notre compétitivité et c’est ce qui constitue le principal support de notre rebond.

L’agilité est l’une de nos valeurs clés et dans notre dynamique de croissance et de diversification nous avons toujours fait très attention à ne pas la perdre. L’agilité est notre boussole au quotidien et cette crise ne fait que la renforcer, tout en renforçant aussi notre culture d’entreprise. A la sortie de cette crise – que nous espérons proche – nous devons être plus forts, plus unis.


Selon vous, quels changements majeurs caractériseront le “monde d’après” ?

J’espère que cette crise entraînera des changements de mentalité en France. Je pense en particulier à deux tendances : la relocalisation et la responsabilisation de notre économie. Pour revenir sur l’importance de l’agilité, je pense que toutes les entreprises en auront besoin. Cela passera forcément par la collaboration entre les grandes entreprises et les plus jeunes.

La relocalisation telle que je l’entends se traduit par la réindustrialisation de certains secteurs au profit du « made in France », ainsi que dans la production et la consommation locale. La collaboration entre des grandes entreprises – soient-elles du BTP ou de l’aménagement des territoires – avec des start-up françaises opérant dans les secteurs de production et distribution à circuit court sera un atout. Je prendrai ici l’exemple de Neofarm – jeune entreprise française que j’accompagne – qui produit des micro cultures bio robotisées en périphérie des villes. 

Par responsabilisation j’entends mieux intégrer dans les usages les enjeux sociétaux et environnementaux. La crise nous révèle toute l’importance et l’urgence de digitalisation de notre secteur. Ou encore pour une meilleure sécurité des villes grâce aux solutions smart city comme celles proposées par XXII, une jeune société française innovante spécialisée dans l’intelligence artificielle. Il est crucial de préparer l’avenir avec ces entreprises innovantes et agiles

Dès le début de cette crise, le Gouvernement a su être réactif et a mis en place des décrets pour simplifier la vie des entreprises. Je pense que cet assouplissement des normes devrait être prolongé pour faciliter la reprise. Nous sommes face à un choc de l’offre et de la demande et devons contribuer tous, chacun à sa mesure, pour surmonter cette crise de manière soutenable.


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